Histoire de navigateurs…

Ils passent inaperçu aujourd’hui tant leurs petites icônes font partie des « meubles » sur nos écrans, et pourtant, sans eux, pas de web, pas de Gmail, pas de Facebook et autres Twitter… qui nourrissent quelques addictions numériques !

Ces « personnages » à la fois si discrets et si présents sur nos écrans d’ordinateurs, ce sont bien sûr les navigateurs. Ils méritent bien un petit éclairage, notamment à l’heure où cela bouge dans le monde des navigateurs… Firefox vient de sortir sa version 4 et Microsoft son Internet Explorer 9, annoncé lors du « South by Southwes »t, événement qui rassemble un festival de musiques originales, et de technologies émergentes.

Le premier d’entre eux, ce fut Netscape Navigator, qui a inspiré l’item « navigateur » (browser). C’est un logiciel destiné à afficher les contenus (textes, images, vidéos…) et nous permettre de surfer sur le web de liens hypertextes en liens hypertextes suivant le protocole HyperText Transfer Protocol (http). Ce protocole a été inventé en 1989 par Tim Berners-Lee, considéré comme l’inventeur d’internet. Pour cela, il fut d’ailleurs anobli par la reine Elisabeth. On lui doit aussi les adresses internet et le HTML, Hypertext Markup Language, format de données qui permet l’affichage des pages web.

En 1990, Tim Berners-Lee développe le premier navigateur-éditeur (qui permet d’écrire le contenu HTML), sous le nom de WorldWideWeb. Il sera renommé Nexus pour éviter la confusion avec le World Wide Web. Ce navigateur utilisait conjointement le protocole http et le protocole FTP de transfert de données (à l’origine unique moyen d’échange et d’accès à internet). Le code source du WorldWideWeb sera confié au domaine public en 1993.

En 1992, avec Marc Andreessen, Tim Berners-Lee travaille à la conception et au développement d’un navigateur web (tel que nous les connaissons désormais) : Mosaic. Un peu plus tard, Andreessen s’associe avec James Clark pour fonder Mosaic Communications Corporation qui sortira le 9 septembre1994 la version béta Mosaic Netscape 0.4. Une version finalisée, capable de supporter le HTML,  Mosaic Netscape 0.9, sortira finalement le 13 octobre. Comme pour Tetris, dans cet univers informatique en construction, les droits de propriété du nom Mosaic déclenchèrent des conflits juridiques.

En 1995, des améliorations notables voient le jour. Elles permettent par exemple l’intégration de nouveaux éléments HTML et l’intégration de l’interface graphique adaptée pour Microsoft Windows 95. Les parts de marché de Netscape, navigateur alors payant, s’élèvent alors à 80%. Ce sera en janvier 1998 que Netscape annoncera la gratuité de son navigateur et la publication de son code source.

Parallèlement, le 16 août 1995, Microsoft sort son propre navigateur Internet Explorer 1.0, inspiré de Spyglass Mosaic. Autre stratégie, le système d’exploitation Microsoft Plus intègre le navigateur. Il donne également la possibilité de l’installer sur les autres versions de Windows 95. Quelques mois plus tard, la version 1.5 d’Internet Explorer équipe tous les systèmes Windows NT. Dans ce contexte, les parts de marché d’Internet Explorer atteignent 95%.

La stratégie de paupérisation infligée à ses concurrents soulève la contestation, d’autant qu’il devient difficile d’installer d’autres navigateurs sur les ordinateurs où IE est intégré au système d’exploitation. Les professionnels critiquent, d’une part la remise en cause du principe de concurrence, mais aussi de voir cesser les innovations qui avaient été apportées au navigateur IE dans ses versions antérieures successives, comme par exemple la possibilité de supporter les styles CSS, ActiveX, Ajax, le DHTML permettant l’affichage de pages web dynamiques… des technologies qui ont construit les bases de bien des outils que nous utilisons actuellement.

Mozilla Firefox, navigateur open source, verra le jour en 2002, sous le nom de « Phoenix », mis à disposition par la Mozilla Foundation, association à but non lucratif installée en Californie. Sa naissance coïncide avec la fin de Netscape qui avait inspiré sa philosophie « promouvoir le choix et l’innovation sur Internet ». Il a en effet été créé pour répondre à l’évolution des usages internet, contrebalancer la stratégie de monopole engagée par Internet Explorer, et aussi tenter de répondre aux nouveaux risques de plus en plus présents sur le web : spyware, adware, pop-ups...

En plus d’être libre et gratuit, Mozilla Firefox est multiplateforme, rapide, intuitif et le plus sécurisé des navigateurs graphiques. Son succès ne se fait pas attendre, auprès des geeks d’abord, puis des entreprises et des administrations. Au printemps 2008, Firefox battra des records de téléchargements. En juin 2008, il figurera notamment dans le Guinness des records pour avoir été le logiciel le plus téléchargé en 24 heures lors de la sortie de sa version 3.

Multiplateforme également, le navigateur Opera a été programmé en 1995 par une entreprise norvégienne, initialement Televerket, puis rebaptisée Opera Software. La particularité d’Opera est son interface multi-documents et la capacité offerte de consulter plusieurs pages en même temps, par fenêtres ou par onglets. Le navigateur est gratuit mais pas open source. En janvier 2011, il représentait 1,35% de parts de marché.

De son côté, après avoir adapté Internet Exploreur pour le Mac, Apple a développé Safari, navigateur proposé gratuitement à l’internaute depuis 2003. Le moteur de rendu de Safari KHTML s’adapte bien aux standards du W3C. Il est un produit du projet KDE qui regroupe un ensemble de développeurs répartis partout dans le monde, contribuant chacun au code source pour développer un logiciel libre. La version 5.0 sortie en 2010 vise une plus grande rapidité d’interprétation des contenus HTML et javascript.

En lisant cette page, ayez une petite pensée pour le navigateur, quel qu’il soit, qui vous permet de l’afficher…

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4 Comments
  1. Hubert Tournier

    A la fin de la “guerre des navigateurs”, on préférait le terme de “butineur” à ceux de “navigateur” ou d’ “explorateur”, trop connotés en faveur de tel ou tel éditeur.
    Cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_navigateurs
    Cf. http://www.presse-francophone.org/apfa/poetes/poetes00/poetes00.htm
    Cf. http://www.presse-francophone.org/apfa/poetes/poetes00/butineur.htm

    Cette traduction a toutefois fait long feu, ne se mariant pas très bien avec la traduction française officielle du World Wide Web : la TAM, Toile d’Araignée Mondiale (les araignées mangent les insectes butineurs…). Ce n’est d’ailleurs pas le seul exemple de ce type, les cookies, avant d’être réhabilités en “témoins de connexion”, ont pendant un temps été qualifiés de “mouchards” !

    Il est donc amusant de voir le terme “navigateur” l’emporter finalement à titre posthume, après le “dumping” qui a permis à Internet Explorer (gratuit et inclus dans Windows) d’écraser Navigator (shareware à l’origine, si ma mémoire est bonne). Il est intéressant également de constater que cette “arme de destruction massive” qu’est la gratuité s’est ensuite retournée contre le vainqueur par le biais des logiciels libres (souvent gratuits).

    Sinon, la première mention d’un navigateur date du 6 août 1991. Elle est dûe à Tim Berners-Lee dans le groupe de discussion alt.hypertext :
    http://minilien.fr/a0kp3t

    Je crois qu’il ne faudrait pas oublier le navigateur en mode caractère, Lynx, que beaucoup d’Unixiens ont utilisé, et plus près de nous, Curl (http://curl.haxx.se/) le couteau suisse d’Internet, pour le surf en mode batch.

    Et maintenant une petite anecdote personnelle :

    En 1997, j’intervenais sur un projet de consolidation budgétaire chez un opérateur télécom, qui devait être réalisé en technologie intranet. Au départ, il était question d’utiliser Netscape Navigator, mais celui-ci connut quelques problèmes d’intégration sur les postes de travail OS/2 customisés de l’opérateur. L’échéance approchant, il fut décidé de développer un navigateur Web graphique de substitution !

    La partie graphique (moteur d’interprétation HTML) fut développée en NSDK, le seul outil de développement dont nous disposions. Dans un premier temps, nous essayâmes d’utiliser Lynx pour la partie communicante (moteur HTTP), mais ce n’était pas très satisfaisant. Puis nous mîmes la main sur un compilateur C avec les bibliothèques de fonctions réseau appropriées et pûmes réaliser un produit complet.

    Par boutade, ce logiciel fut initialement appelé ESCAPE (Elégant Système de Communication Alternatif pour Pillar Essentiellement – Pillar étant le logiciel de consolidation utilisé). Mais cette plaisanterie n’était pas du goût des équipes chargées d’intégrer Netscape Navigator, et nous dûmes renommer le produit en ISBNET (Indispensable Substitut du Browser Netscape, Efficace mais Temporaire – ISB était le nom du projet de consolidation budgétaire).

    Les premiers essais furent catastrophiques ! En effet, nous avions implémenté strictement la version HTML de l’époque, alors que la plupart des concepteurs de sites ne la respectaient pas. Les navigateurs du moment étaient (et sont probablement toujours) extraordinairement tolérants par rapport aux erreurs. Nous dûmes donc assouplir notre navigateur et y intégrer un mécanisme d’auto-déploiement afin de parer à la découverte de nouvelles aberrations de codage HTML, car à cette époque les déploiements étaient longs et très coûteux. A chaque lancement, notre logiciel vérifiait donc l’existence d’une version N+1 sur un serveur Web technique, et l’installait pour la session suivante si elle était disponible. Ce mécanisme permettait en outre d’avoir un suivi en temps réel des déploiements, particulièrement apprécié par notre maîtrise d’ouvrage. Aujourd’hui c’est tout à fait banal, mais pour l’époque c’était une innovation, qui venait d’ailleurs bousculer des modes de fonctionnement encore très manuels…

    Ce navigateur fut développé avec un camarade d’Alcatel TITN Answare sur une période de 2 mois (quelques nuits comprises) et permit de lancer le projet de consolidation budgétaire dans les délais impartis.

    Bien cordialement,

    PS: Tim Berners-Lee n’est pas “considéré comme l’inventeur d’internet”, mais comme celui du World Wide Web, qui n’en est qu’un sous-ensemble.

  2. JP Noël

    Le(s) navigateur(s) est le logiciel ouvert le plus longtemps sur mes ordis ! En fait il n’est pas rare d’en avoir deux ouverts en même temps… on peut comprendre cette “guerre des navigateurs” du moment que sur nos machines ils ne mettent pas l’écran à feu et à sang !!! 🙂

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