Le Texte Supérieur, ou Hyper Texte… une idée née dans les années 40, mais la technologie n’est pas encore prête !
Il fait partie du décor, chaque jour sous nos yeux, sur nos écrans. On le clique, on l’effleure du bout des doigts des dizaines de fois par jour, comme on respire… sans même y penser ! Quand on parle de lui, on ne lui conserve que son diminutif, « lien ». Mais son vrai nom est « lien hypertexte ».
Ainsi, on le dit « hyper », du grec ancien « hypér », qui signifie : supérieur, au-dessus de la moyenne, voire excessif (hyper-actif, hyper-tension…). Hyper, cette épithète, associée au mot « texte », ne prend-elle pas véritablement tout son sens aujourd’hui dans l’univers du Big Data ? Mais comment cette association sémantique est-elle née ?
Le rêve de créer un « texte supérieur », nourri par un réseau exponentiel d’intelligences, sans frontière, offrant à l’homme plus de pouvoir pour changer le monde, est ancien. Sans doute beaucoup plus qu’on ne l’imagine. Mais c’est en 1936 que l’écrivain H.G. Wells, auteur de science-fiction et prospectiviste, exprime l’idée d’une encyclopédie mondiale reliant les intellectuels d’un bout à l’autre de la planète. Il imagine un média comme support à ce projet de coopération intellectuelle… Mais l’informatique n’en est encore qu’à l’état conceptuel, dans l’esprit d’un certain Alan Turing… auteur cette année-là du célèbre article fondateur « Théorie des nombres calculables, suivie d’une application au problème de la décision » !
Quelques années plus tard, en 1945, Vannevar Bush, chercheur au MIT, publie un article intitulé « As We May Think ». Il y décrit une sorte d’extension de la mémoire humaine qu’il baptise « Memex », sorte d’ordinateur analogique fictif permettant de créer des liens entre différentes sources d’informations. C’est ce qui inspirera le futur lien hypertexte notamment auprès d’un des pères de l’informatique, Douglas Engelbart, également inventeur de la souris informatique.
Du concept au concret… l’hypertexte fait lien depuis 40 ans !
Si, comme l’a dit Albert Camus, « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde », les bien nommer contribue à mailler notre culture !
Le terme « hypertexte » est né en 1965 sous la plume de Ted Nelson, sociologue américain qui imagine une machine susceptible de stocker l’information pour la rendre accessible à tous. Il utilise ce mot dans la publication « Une structure de fichiers pour le complexe, ce qui change et les intermédiaires » qu’il présente lors de la 20ème conférence nationale de l’Association of Computer Machinery.
Ted Nelson prolonge son idée à travers le projet Xanadu, « système d’information permettant le partage instantané et universel de données informatiques ». Le principe du lien hypertexte était posé ! Il sera repris notamment par Tim Berners-Lee en 1990, avec le HTTP (Hyper Text Transfer Protocol), base du World Wide Web.
Le lien hypertexte, un supplément d’âme…
Si l’hypertexte, tel que nous l’utilisons quotidiennement sans plus y penser, est un mode de navigation d’informations en informations, liées de façon non séquentielle, il avait été pensé par Vannevar Bush comme une représentation du mode de pensée et d’apprentissage de cerveau humain, c’est-à-dire par association. Nous rebondissons d’un mot à un autre, par association d’idées, selon nos modes de pensées. A l’instar aujourd’hui de notre façon de naviguer sur le web…
N’est-ce pas ce qui rend l’hypertexte si intuitif et qui a fait le succès du Web ?