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CIGREF - AFMD - Juillet 2013
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Les métiers du numérique ont été considérés par les chercheurs en gestion, depuis la
fin des années 90, comme un observatoire particulièrement éclairant de l’évolution des
carrières et des formes de rapport au travail et à l’emploi dans la sociétéde l’information.
Si des premières conceptualisations des évolutions observées dans le numérique ont
conduit à
opposer deuxmodèles de carrière, la carrière organisationnelle et la carrière
nomade
,
les recherches menées par la suite ont montré un
large éventail de formes
intermédiaires
entre ces deux pôles : carrières techniques, multi-projets, fragmentées,
etc. sont autant de variantes spécifiques mettant en jeu de manière particulière les
rapports à l’organisation, au métier et au marché du travail.
Ces formes de carrières ne s’expriment pas de la même manière pour les hommes
et les femmes
.
On connaît l’effet de « plafond de verre »
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qui empêche, par des
mécanismes sociaux implicites et informels subtils, l’accès des femmes aux postes de
direction supérieurs (ce plafond se situerait un peu au-dessus de la position de chef
de projet). Dans le cas des entreprises du numérique, non seulement les structures
organisationnelles tendent à l’aplatissement des structures hiérarchiques, mais elles
souffrent également de procédures plutôt opaques guère propices à la promotion des
femmes. Celles-ci favorisent en effet davantage l’avancement par cooptation, basée sur
une connaissance professionnelle et extra-professionnelle partagée plus facilement
par les hommes, alors que les femmes feraient davantage reposer leur justification à
l’avancement par leurs seuls résultats professionnels. Du côté des carrières techniques
(
internes), celles-ci non plus ne sont guère favorables aux femmes…
Reste donc que les
femmes sont particulièrement sujettes aux carrières marquées
par des formes de mobilité qui s’apparentent plutôt à la forme de la carrière
fragmentée que nomade.
Non seulement les arguments qu’elles mettent en avant
en cas de mobilité sont divergents par rapport aux hommes, ceux-ci étant davantage
entrelacés de motivations professionnelles et de préoccupations de qualité de vie,
mais les femmes présentent une exposition plus forte aux interruptions de carrière
et à la mobilité géographique. Ainsi les passages de début de carrière en SSII, de
projets en projets, de rebonds en cas de restructurations, représentent des moments
davantage critiques et biographiquement plus éprouvants, chez les femmes, que chez
les hommes.
Carrières et rapport au travail :
deux dimensions aveugles au genre
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Cette expression désigne « le fait que, dans une structure hiérarchique, les niveaux supérieurs ne
sont pas accessibles à certaines catégories de personnes. » L’expression est utilisée ici pour souligner la
difficulté d’accès des femmes aux postes supérieurs, dans les métiers du numérique.