S’il est un secteur d’activité traditionnel, c’est bien celui de l’immobilier.
D’une part, la prestation généralement proposée dans ces métiers est on ne peut plus concrète, avec une dimension physique affirmée et une fixité géographique indubitable.
D’autre part, et ceci ayant peut-être été engendré par cela, les chasses gardées, le culte du secret et de l’information exclusive cachée bien au chaud, sont inscrits au plus profond des gènes de la culture immobilière depuis des décennies.
La portion congrue du numérique dans un paysage bien établi
A l’inverse de certains secteurs d’activité plus avides de nouveautés ou à l’appétence technologique plus marquée, la relation entre numérique et immobilier n’est jusqu’ici ni spontanée ni spectaculaire.
Bien sûr, le recours aux bases de données est un standard depuis longtemps.
Bien sûr aussi, la diffusion d’informations à partir de ces bases de données est un fait établi.
Mais rien de fondamental n’a changé dans la nature de la relation entre professionnels et consommateurs.
Suivant la prédisposition de chacun à regarder le verre à moitié vide ou à moitié plein, on pourra ainsi considérer :
- que la propension des professionnels (agents immobiliers, conseils en gestion de patrimoine, promoteurs…) à vouloir maintenir en l’état un système ayant fait ses preuves voue à l’échec toute transformation profonde du tissu et des habitudes,
- ou bien estimer, comme l’optimiste numérique, qu’en partant d’aussi loin on ne peut que progresser.
Dans cette deuxième hypothèse, certaines initiatives récentes permettent cependant d’espérer, grâce aux nouvelles technologies, une transformation significative des pratiques futures ou, à tout le moins, une plus grande diversité de choix.
L’état des lieux actuel dans le parc existant
Dans l’immobilier ancien les ventes entre particuliers représentent environ 50 % des transactions. Un article paru sur Les Echos dresse globalement le paysage d’une profession très traditionnelle et pourtant condamnée au mouvement. Pas seulement celui des ouvertures ou fermetures d’agences, mais bien celui d’une autre forme de service à proposer. Celle qui met en avant un surcroît de nouveaux services (visites virtuelles, home staging) et facilite l’émergence d’agences en ligne low-cost, pour laquelle le numérique apporte sa pierre à l’édifice.
En filigrane de cette évolution, l’enrichissement du contenu des annonces ou leur diffusion plus massive grâce à la dématérialisation et à la multiplication des portails accroissent ainsi l’influence digitale sur l’évolution du marché secondaire du logement.
L’information devient de fait plus qualitative et plus fraîche, avec le temps réel généralisé en ligne de mire ?
Le numérique à l’assaut du neuf
Si les structures du marché de l’ancien sont empiriques à certains égards, l’immobilier neuf (le marché primaire) est a contrario parfaitement organisé, la production étant toujours à l’initiative de professionnels.
Les progrès du monde numérique sont là aussi patents sur certains aspects : échanges de fichiers informatiques entre géomètres et architectes ou bureaux d’études, production d’images 3D, films publicitaires… le processus productif a rendu les armes sans regrets.
Mais il reste en revanche à faire sauter un dernier verrou culturel et économique – celui de la méthode de commercialisation des logements – à travers une croisade numérique visant à libérer l’accessibilité du neuf : donner toute l’information en transparence, depuis le produit jusqu’au prix et – soyons fous – permettre à l’homo numericus d’accéder à la liberté d’une décision autonome et d’une réservation en ligne. A prix forcément plus favorable. Le futur Drive-in de l’achat immobilier dématérialisé ?
Les moyens d’espérer un bouleversement des références
Le paradoxe n’est qu’apparent. Transformer le virtuel en réel ou gommer les distances, qu’elles soient physiques ou temporelles, revient à conférer un statut de réalité ou quasi réalité à l’information par la grâce du numérique.
Quel meilleur moyen pour abolir l’éloignement d’un immeuble ou d’un terrain que de présenter des images comme si on y était ?
Quelle meilleure idée pour transformer un projet en réalité instantanée – virtuelle certes – que de donner vie en 3D et en mouvement à des plans d’architecte techniques, statiques, sans couleur et sans vie ?
En résumé, transformer le profane inquiet en promeneur (et consommateur…) apaisé et confiant, ne semble aujourd’hui plus hors de portée. Et l’utopie d’hier pourrait sans doute rencontrer l’appétence des acteurs de la vente sur plans, convertis avec l’aide d’une conjoncture peu gaillarde aux atours d’une réalité virtuelle augmentée ?
Et si la naïveté d’une information numérique (à l’origine binaire) transformait toutes les vitrines du net en maisons de verre, n’irait-on pas vers une forme de révolution de la transparence ? Même – et surtout – dans des secteurs aussi conventionnels que l’immobilier ?
Par Marc Vaissié de Logementdirect.fr