1971, l’aventure de la lecture numérique commence !

4 Juillet 1971, le CIGREF va bientôt souffler sa première bougie. Dans le même temps, un étudiant de l’Université de l’Illinois rêve de voir un maximum d’œuvres littéraires accessibles gratuitement pour tous !

Michael Hart dispose d’un accès à l’un des ordinateurs du Materials Research Lab de l’université. Il voit davantage en l’informatique le moyen de  matérialiser ce rêve que ses capacités de calcul ou de bases de données. Il imagine la numérisation des œuvres littéraires et leur mise à disposition sous le nom de « Projet Gutenberg ». En 1971, il ne s’agit pas d’une numérisation telle que nous la connaissons aujourd’hui. Non, ce 4 juillet, jour de la Fête Nationale, le jeune étudiant se met au clavier et saisit le texte de la « Déclaration d’indépendance des États-Unis ». Le fichier ainsi saisi fait 5Ko. Internet n’existait pas encore, mais son ancêtre, Arpanet, commençait à relier les universités des Etats-Unis. Michael Hart dépose un message sur le réseau, annonçant qu’il laisse l’accès à ce fichier pour tous les membres inscrits, une centaine à l’époque. Ce fut le premier « ebook » de l’histoire.

Si un peu plus de 5 siècles plus tôt, la Bible, premier livre imprimé par Gutenberg en 1454, le fut en 180 exemplaires, le premier « livre numérique » de Michael Hart ainsi proposé fut téléchargé 6 fois…

Hart poursuit lui-même la numérisation de textes aussi divers que « la Bible » ou « Alice au pays des Merveilles », avant de voir d’autres passionnés par le projet venir l’aider bénévolement. Peu à peu, cette première « bibliothèque électronique » de livres physiques existants s’étoffe. 40 ans plus loin, en juillet 2011, le projet Gutenberg, dont la devise est « Brisons les barrières de l’ignorance et de l’illettrisme », propose une collection de plus de 36 000 livres, dans une quarantaine de langue, même si la plupart sont en Anglais. Les ouvrages qu’il rassemble sont des textes du domaine public ou dont le copyright a expiré. Certains auteurs ont également donné leur autorisation pour cette publication électronique.

Les ouvrages proposés par le Projet Gutenberg sont codés au format ASCII 7 bits ce qui, non seulement les rend lisibles sur toutes les machines, mais ne les prédispose sans doute pas à la disparition, ce codage n’étant vraisemblablement pas menacé, même s’il exclut les caractères accentués utilisés en français. Par contre, pour répondre à des demandes de modernité, certains ouvrages du Projet Gutenberg sont maintenant téléchargeables au format HTML. En effet, par essence-même, le Projet Gutenberg a largement bénéficié de l’arrivée d’Internet et de son essor dans les années 90.

Du livre à l’ebook…

Pour Michael Hart, le « texte électronique » ne saurait être concurrencé par la lecture sur papier. Selon lui, le seul point commun entre lecture papier et lecture numérique est qu’il s’agit des mêmes œuvres !

Internet n’est pas le seul à avoir contribué à l’essor de la lecture numérique. Les technologies de numérisation également. Mais comment lire aisément ce texte électronique qui se déroule en continu à l’écran ?

La première « liseuse » baptisée « Cybook » apparait en France en 1998, à l’initiative de Jacques Attali et Erik Orsenna. La liseuse, ou e-reader, est une sorte de « bibliothèque nomade ». Elle peut archiver de nombreuses œuvres ainsi accessibles à la lecture à tout moment, en tous lieux, sur son petit écran. Ses évolutions se font au rythme de la miniaturisation des composants et des avancées technologiques numériques, aujourd’hui embarquées sous formes d’applications pour les smartphones et tablettes numériques.

A chaque civilisation, la lecture a évolué en fonction de son support. De l’argile au papyrus, puis au parchemin. Le papier apparu en Chine deux siècles avant J-C, puis le livre au 15ème siècle. Aujourd’hui, une nouvelle réflexion sur les cultures numériques s’engage et, même si la question n’est pas nouvelle, on peut se mander « qu’est-ce qu’un livre »…

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Un commentaire
  1. Hubert Tournier

    Un des apports majeurs du projet Gutenberg et de son fondateur Michael Hart (malheureusement décédé deux semaines avant la publication de ce billet) est d’avoir compris l’intérêt d’un réseau tel qu’Internet pour la préservation et la dissémination des contenus numériques.

    A l’époque où le Web n’existait pas encore, un grand nombre de sites FTP proposaient déjà des copies “miroirs” des fichiers du projet Gutenberg. C’était, en quelque sorte, une sorte de réseau Peer-to-Peer avant l’heure…

    C’est d’autant plus important que, pendant que “la lecture évoluait en fonction de son support”, les capacités de préservation évoluaient en sens inverse !

    On a coutume de dire que la durée de préservation d’une information est inversement proportionnelle à la densité de son stockage.

    Un bel exemple (de ce qu’il ne faut pas faire) en a été donné au travers du projet d’actualisation du “Domesday book” mené par la BBC en 1985. Alors que l’ouvrage d’origine fêtait son neuf centième anniversaire, la v2 a failli être perdue à peine 15 ans après sa production !
    Cf. http://www.parl.gc.ca/About/Parliament/DigitalPreservation/PDF/Session1Challenges-f.pdf (planches 17 à 23)

    Et c’est également particulièrement important en cette époque où l’on confie ses données numériques personnelles à des fournisseurs d’informatique en nuage (qui peuvent vous débrancher unilatéralement), ou quand celles-ci sont étroitement associées à un dispositif matériel (un SPIME dirait Bruce Sterling) à l’obsolescence programmée.
    Cf. http://www.internetactu.net/2011/09/09/il-est-temps-de-reglementer-la-propriete-dans-les-nuages/
    Cf. http://mitpress.mit.edu/catalog/item/default.asp?tid=10603&ttype=2

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