La 11ème édition des Assises de la Sécurité et des Systèmes d’Information accueillait aujourd’hui pour la plénière d’ouverture, Luc Ferry, agrégé de philosophie, docteur d’Etat en sciences politiques, et ancien Ministre. Luc Ferry s’est exprimé sur l’inclinaison sécuritaire de nos sociétés modernes. Dans le monde numérique, les risques d’abus et les dangers liés à l’usage des technologies inquiètent. Véritables dangers, ou paranoïa collective, des questions se posent.
A l’issu de son intervention, Luc Ferry est interrogé sur le décès de Steve Jobs annoncé ce matin.
(extraits) :
Je suis très frappé par le vocabulaire qui revient dans les médias à propos de Steve Jobs. Notamment le mot « génie ». On entend sans cesse depuis ce matin : « il était génial » !
C’est vrai que Steve Jobs est l’incarnation-même de ce que notre siècle tient comme étant le génie. Mais ce n’était pas du tout un génie. C’était un homme extrêmement intelligent, talentueux. Or un génie pour moi c’est Aristote, Nietzche… ce n’est pas Steve Jobs.
Pourquoi est-il l’incarnation, dans l’imaginaire aujourd’hui, de la génialité à l’état brut ? Simplement, il incarne – comme nul autre ! – les deux traits principaux de la société moderne: l’innovation pour l’innovation et la rupture avec la tradition.
Tout chef d’entreprise sait aujourd’hui, dans le contexte benchmarking généralisé, que s’il n’innove pas, il meurt ! Or, Steve Jobs est l’incarnation-même du monde de l’innovation. Ce petit objet-là, votre smartphone, c’est l’objet sur lequel la mondialisation pèse le plus fort. C’est l’objet qui est la quintessence du benchmarking, de la compétition. Si vous ne sortez pas dans 3 mois un iPhone 5, juste vous êtes mort ! Ce n’est pas une question de projet, pas une question de sens de la vie, ce n’est pas une question d’idéal, c’est une question de survie !
L’innovation n’est pas un projet, l’innovation c’est la loi du monde. C’est un cahier des charges, c’est une contrainte absolue. Steve Jobs incarnait l’innovation et la rupture avec la tradition. Il se comparait, à juste titre, à un artiste. Il incarnait tout le côté ludique et fun de la consommation. Rien n’est plus marrant, plus sexy, plus agréable, plus amusant que ces objets numériques ! Tous nos enfants veulent cela…
Il incarnait les deux traits les plus fondamentaux du capitalisme moderne, la logique absolue de l’innovation. Le nouveau cahier des charges du capitalisme : l’innovation pour l’innovation et en même temps le côté ludique et consumériste, le plaisir, l’hédonisme. De ce point de vue-là, oui, Steve Jobs est génial ! Mais il n’y a pas une vision du monde derrière. Il y a juste une magnifique manière d’épouser les contraintes et les logiques du capitalisme moderne… Si l’on appelle cela génial, alors oui, c’est le plus grand génie du temps présent.
Je ne partage pas du tout le raisonnement de Luc Ferry sur le “génie” de Steve Jobs, même si j’arrive à la même conclusion !
Un génie c’est quelqu’un qui possède un talent inouï, supérieur au commun des mortels, comme Mozart par exemple…Mozart, à 4 ans devant son piano, n’a pas une vision du monde ni un idéal, ni le sens de la vie… il a un talent inouï qui, avec beaucoup de travail et de rigueur aussi, fera de lui un génie.
Steve Jobs avait ce même talent dans un autre art que la musique ou la peinture.
Et son art lui a permis de “changer le monde” beaucoup plus que ne l’ont fait d’autres génies. Steve Jobs n’est pas seulement le créateur de l’iPhone ou de l’iPad, il est celui qui a mis le pied à l’étrier de l’informatique pour tous, notamment en introduisant l’interface graphique dans ses ordinateurs. Sans doute d’autres l’auraient-ils fait plus tard, mais c’est symbolique de la pensée de Steve Jobs, de permettre la facilité d’usage de l’informatique et du numérique. En ce sens, avec son talent d’innovateur, il me semble que ce fut un génie.
Sinon, j’adhère totalement au discours de M. Ferry sur l’innovation. Le vélo qui n’avance pas tombe…
Ok Marc: quand on change le monde pas une fois mais tout au long d’une vie, on est un génie !
Et comme il le disait : “et vous ? qu’avez vous fait de si génial ?”